Opus pour trois villes

photo OPUS 3 VILLESPhoto : Jean-Michel Coubart

Dans un contexte de transformations urbaines, le passé tout proche refait surface tandis que le bitume fond sous la pression immobilière.

À partir de détails ramassés ça et là dans l’espace public , deux femmes extrapolent. Des histoires émergent alors et font apparaitre des vies de tous les jours. Des univers se choquent, se croisent, s’entremêlent, se répondent

Les deux femmes font parler la carte sensible, disent la colère et l’impuissance avec une gravité non dépourvue d’humour. Serait-ce l’évocation d’un monde en voie de disparition ? Un hommage aux grands ensembles et à ceux-celles qui les habitent.

Parcours du spectateur, de la spectatrice

Une tente blanche de 12 mètres de long par 4 de large, installée sur une place, un parking, ou peut-être au détour d’une rue proche de travaux.

Une tente comme il en pousse ici et là dans l’espace public pour informer, concerter, convaincre... Le changement urbain est là, il fait irruption dans ton quartier, et voici qu’une jolie tente blanche est là pour le confirmer.

Elles sont là, elles aussi, devant cette tente blanche. Elles vont bientôt te faire entrer.

Petite introduction, craquements, et tu pénètres dans ce qui s’apparente à un laboratoire.

  • Il y a 3 cartes blanches d’un mètre par un mètre, tracées au noir ;
  • Il y a des gants blancs ;
  • Il y a des sachets suspendus, entiers ou en fragments, rouges, blancs, verts ;
  • Dans les sachets, il y a des petits objets, et des étiquettes qui indiquent le lieu, l’heure, l’année du ramassage.

Tu es invité·e à t’assoir, en un face à face confortable.

Elles, deux femmes, l'une jeune et l’autre moins, accompagnées par un violoncelliste, vont dévoiler ce que racontent les objets. Ici, pas de termes savants ou d’envolées géopolitiques (quoique), plutôt des détails, des mots, qui font apparaître, toucher du doigt : des lieux, des gens, des émotions.

Et peu à peu c’est tout un paysage humain et urbain qui surgit, paysage qui ressemble à s’y méprendre à un quartier que tu connais-sais, à ton quartier, à un quartier que tu penses avoir vu à la télé...

Extraits

 Je roule de mes chaines et j’écrase, inlassablement. bientôt il ne restera rien, tout plat. tout lisse.
J’emporte vos restes dans un grand champs de restes. Demain parc aménagé, belvédère, point de vue imprenable pour résidences ultra modernes, tours qui s’élèvent très haut dans le ciel.
Que c’est bon. le son de mon moteur, le couinement de mes chaines, le son âpre des raclements face au flux qui passe. de voitures, de piétons, de vélo casqués, de motos ronflantes.
Parfois j’attaque un champs entiers de maisons de bois. en une seconde, comme le loup qui souffle, tout est par terre. Déshabillé.

B : à propos de la Carte 1
Chez nous il y a un château.
Chez nous il y a des arbres.
Chez nous il y a une rivière qui coule sous nos pieds.

A : à propos de la Carte 3
Chez nous c’est les carrières sous les pieds.
Chez nous ils ont creusé et maintenant il rebouchent.
Chez nous bientôt une gare ultra moderne et nous irons (ou pas) à la défense en vingt minutes.

B : à propos de la Carte 2
Chez nous c’est refermé.
Nous sommes les petits derniers de la "politique de la ville".
C’est petit.
C’est serré.
Tout est là.